Véritable enjeu de santé publique, l’ostéoporose désigne une maladie osseuse qui augmente le risque de fractures. Et si l’ostéoporose avait également un impact sur le risque de perte auditive ? C’est ce que suggère une étude américaine selon laquelle les femmes atteintes d’ostéoporose ou présentant une faible densité osseuse auraient un risque de perte auditive.
Le risque de perte auditive liée à l’âge
Plus de 10 % de la population française serait confrontée à une perte d’acuité auditive. Lorsque cette baisse de l’audition est liée à l’âge, on parle de « presbyacousie » ou « d’hypoacousie ». Bien qu’elle soit due au vieillissement normal de l’oreille, d’autres causes simultanées de surdité comme des antécédents d’otites, un traumatisme ou encore une exposition au bruit peuvent en être à l’origine. Dans tous les cas, la perte auditive est irrémédiable.
À savoir ! On estime que la perte auditive est de 0,5 décibel en moyenne par an à partir de 65 ans, d’un décibel par an à partir de 75 ans et de deux décibels par an à partir de 85 ans.
Des études antérieures ont révélé chez des personnes malentendantes une prévalence plus importante d’ostéoporose et de faible densité osseuse. Mais jusqu’à présent, peu d’études se sont intéressées à l’impact de l’ostéoporose sur le risque de perte auditive. Or, la perte auditive étant irréversible, identifier les facteurs de risque de perte auditive afin de pouvoir éventuellement les modifier s’avère indispensable.
Récemment, une étude menée sur modèle animal a révélé que les bisphosphonates pouvaient aider à prévenir les dommages auditifs induits par le bruit. Inspirée par les conclusions de cette étude, une équipe de chercheurs a souhaité savoir s’il existait un lien entre l’ostéoporose et le risque de perte auditive ultérieure et si les bisphosphonates pouvaient modifier le risque de perte auditive chez les adultes.
À savoir ! Les bisphosphonates désignent le principal traitement utilisé pour prévenir les fractures chez les personnes ayant une densité osseuse réduite.
L’impact de l’ostéoporose sur l’audition
Pour mener à bien ses recherches, l’équipe du Brigham and Women’s Hospital de Boston a analysé les données de santé de 144 000 femmes, dans le cadre de l’étude CHEARS (Conservation of Hearing, conservation de l’audition). Les chercheurs ont ainsi eu accès à des cohortes très importantes, suivies sur des durées allant jusqu’à 34 ans ! Ils ont par ailleurs utilisé des données de l’étude CHEARS relatives aux seuils audiométriques des participants.
À savoir ! Un audiomètre est un appareil qui permet d’évaluer la sensibilité auditive d’une personne. Il mesure ses seuils audiométriques de perception suite à différents types de stimulation acoustique.
Les scientifiques se sont par ailleurs appuyés sur les données de deux grandes études incluant des cohortes d’infirmières (démarrées en 1976 et 1989) et intitulées Nurses’ Health Study (NHS) et NHS II. Les chercheurs ont ensuite examiné une perte auditive de sévérité modérée ou aggravée, telle que déclarée par les participants sur des questionnaires remplis tous les deux ans. Les chercheurs ont ainsi pu ont pu mettre en relation plusieurs éléments avec les déficits auditifs : l’ostéoporose, la perte de densité osseuse, la prise ou non de bisphosphonates et les fractures de vertèbres et de hanches.
Ils ont ainsi observé les résultats suivants publiés dans le Journal of the American Geriatric Society :
- Risque de perte auditive 40% plus élevé chez les femmes atteintes d’ostéoporose ou d’une autre forme d’affaiblissement osseux.
- Pas de modification du risque de perte auditive avec la prise de bisphosphonates.
Pour l’auteur principal de l’étude, ces résultats suggèrent donc que l’ostéoporose et la faible densité osseuse peuvent contribuer de façon non négligeable à la perte auditive liée au vieillissement.
Vers des recherches plus approfondies
Ces premières conclusions suggèrent que des recherches plus approfondies sur le sujet sont nécessaires. Car les scientifiques n’ont pas encore élucidé quels étaient les mécanismes impliqués dans le lien entre ostéoporose et perte auditive. Selon eux, le remodelage osseux anormal aurait un impact sur le fonctionnement des organes impliqués dans l’audition. Une autre question reste également en suspens : les bisphosphonates, administrés à certaines doses ou à certains moments pourraient-ils jouer un rôle préventif ou curatif contre la perte auditive ?
En attendant de pouvoir répondre à ces interrogations, les chercheurs ambitionnent déjà de mener de nouvelles études sur le lien éventuel entre apport en calcium/vitamine D (utilisés pour prévenir l’ostéoporose) et perte auditive. Car des études menées par le passé avaient démontré qu’une alimentation saine et l’exercice physique contribuaient à réduire le risque de perte auditive. Pour les auteurs de l’étude, nul doute qu’une alimentation et des habitudes de vie saines au quotidien peuvent contribuer à la protection de la santé des os et de l’audition à un âge avancé. Affaire à suivre avec une oreille attentive !
Déborah L., Docteur en Pharmacie
– La surdité et les causes de la perte auditive. ameli.fr. Consulté le 5 juillet 2021.